"Un mois de confinement, un mois de semi-liberté ou de semi-prison, selon que l'on voie le verre plein ou le verre vide. Imaginez quatre semaines dans 5m2. N'est-ce pas une prison ? Physiquement oui, mais pas psychologiquement. C'est l'immense différence. Certes, il faut s'auto-remplir une autorisation de déplacement, les sorties sont limitées dans le temps et la distance, mais j'ai eu la chance de trouver un lieu de confinement en bordure de village, avec un chemin de terre et des pâturages à 100 m et des bois à 500 m. Dans une époque de liberté totale, 1 km cela paraît surréaliste. Dans ces temps de restriction, quand je sais que j'aurais pu être coincé dans un appartement en ville avec des rondes de police tous les 500 m, j'estime que mon petit Hymer est un vaste espace de liberté : je peux ouvrir le lanterneau et observer le ciel bleu parsemé de nuages que j'aurais pu approcher en parapente. Je peux vaquer à des occupations que je n'aurais pas pris le temps d'entreprendre : un peu de bricolage sur le camping-car comme poser des bavettes de roues, et veiller sur la maison.
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La liberté est surtout numérique : ah ! les nouvelles technologies. J'aime cette époque où l'on peut voyager à travers le monde et les cultures, ce village global de communication, de libre-échange, de transactions. C'est une liberté que nos anciens n'avaient pas, mais qui serait désormais peut-être pire que la privation de déplacement telle qu'on la vit actuellement. Imaginez un monde sans Internet : impossible de communiquer, d'envoyer des photos, de publier, de connaître le monde différemment des médias traditionnels. C'était un outil de loisirs, c'est devenu un outil indispensable entre les e-mails, les réseaux sociaux, les sites d'achat. Non je pense qu'en ces temps de confinement, la véritable prison serait d'avoir un virus informatique qui paralyse tous les réseaux, qui nous empêcherait d'écouter les stations radio d'autres pays, de visionner des vidéos de voyages, de préparer ses prochains périples, de rêver. Ah non ! allez-vous dire. Pour rêver, point besoin de 4G ! C'est vrai, il suffit de fermer les yeux, d'espérer que le confinement total ne durera que 10 semaines ! Oui à tout réfléchir, rien ne vaut le réel sur le virtuel. Rien ne vaut la caresse du vent marin sur les joues, les embruns des vagues sur la peau, entendre les mouettes rieuses sur les quais et les mâts des bateaux qui dansent au gré du flux et du reflux. Rien ne vaut la caresse du soleil qui tape sur une barrière rocheuse alpine survolée par un aigle royal, et rien ne vaut ce clapotis de l'eau contre une barque qui somnole paresseusement contre un pont en bois. Autant d'images qui sont, pour l'instant, mises entre parenthèses, mais la santé a un prix et la parenthèse se refermera."